Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
Les Muselés
Aro Sáinz De la Maza
Actes Sud
2 janvier 2019
368 pages traduites par Serge Mestre
Thriller Polar
Chronique
28 novembre 2021
« Dans une Barcelone asphyxiée par la crise, l’auteur conduit un thriller poignant sur la ligne rouge qui mène au précipice les exclus du système. »
Ça y est, je suis accro à cette série policière consacrée à Milo Malart, inspecteur barcelonais à l'empathie exacerbée, aux méthodes singulières, vivant son existence comme en sursis à l'instar de cette société en pleine crise économique et morale. Alors que la question de la Souveraineté se pose, que l'indépendance est dans tous les esprits, que se libérer de l'effet dévastateur d'un gouvernement corrompu à la solde de grandes fortunes se comportant encore comme des propriétaires terriens d'un autre temps, le jeune homme assisté de sa collègue Rebecca, traque le tueur d'une étudiante en droit et en même temps un sacrificateur de chiots en bordure de parcs pour enfants.
Dans ce monde perverti, sous une pluie qui n'en finit pas, sa hiérarchie le pousse à privilégier l'enquête sur la tuerie canine...
La disparition d'une jeune femme issue d'un milieu modeste n'est pas assez vendeuse.
Mais dès le début, Milo remarque les ongles manucurés de la morte. Cela ne cadre pas avec le profil de la victime qui par ailleurs travaillait pour trois fois rien dans un cabinet d'avocats. Rien ne cadre dans cette histoire.
Entre insomnies, terreur de déclarer les premiers symptômes de la schizophrénie ayant condamné son père et son frère au suicide ou à l'internement, séances de natation à l'aube dans l'eau glacée de la Méditerranée, coups de poing dans le bide à la vision de la misère qui avale une Barcelone terrifiante et cauchemardesque, Milo est prisonnier d'un tableau crépusculaire à la Goya.
Bientôt ses intuitions se vérifient, une autre mort oriente les enquêteurs vers d'autres pistes.
J'aime le style magnifié par la traduction, j'aime les descriptions de cette ville en perdition, j'aime les dialogues ciselés très authentiques, j'aime l'humour désespéré, j'aime la tendresse affleurante, j'aime ce camaïeu de gris.
Pour adoucir le tout, deux jolies rencontres permettent d'alléger un peu le quotidien de Malart : l'une avec un chien rebaptisé "mon vieux", et l'autre avec une femme sympathique, promeneuse sur la plage d'une petite chienne, personnage introduisant également une réflexion sur la corruption du monde politique catalan.
Comme je lis la série à rebours, mon prochain épisode sera en fait le premier tome, " Le bourreau de Gaudi", grand succès de librairie. J'ai hâte. Vous trouverez ma chronique sur le troisième opus "Docile" sur ma page Eva Impressions littéraires.