Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
Le collectionneur
Fiona Cummins
Slatkine & Cie
2018
505 pages traduites par Jean Esch
Thriller
Chronique
11 mai 2019
Titre original : "Rattle"
Bouleversant et terrifiant à la fois, à l'instar du calvaire que traverse les victimes de la fibrodysplasie ossifiante progressive ou maladie de l'homme de pierre (apparition d'un deuxième squelette les enfermant dans une vraie prison d'os), et du personnage du croque- mitaine appelé aussi Tommy Rawhead ou Bloody Bones, hantant tout ce récit, émergeant de la moindre obscurité pour terroriser les enfants.
Un prologue glaçant nous fait rencontrer un collectionneur fou, perpétuant une tradition familiale par les pères.... Il est fort excité par l'arrivée prochaine d'un spécimen très particulier dont la place est déjà toute trouvée dans une de ses vitrines....
Puis un compte commence, celui des jours qu'il faudra supporter à partir de ce vendredi de novembre à Londres à 15h21 où Erdman Frith, par le simple choix de prendre de la viande pour le dîner contre l'avis de sa femme Lilith, mais pour que son fils de six ans, malade, puisse se faire un peu de muscle, va enclencher malgré lui une série d'événements catastrophiques, réveiller le croque-mitaine qui menace son petit Jakey souffrant de Fibrodysplasie ossifiante progressive.
À 15h23, le même jour, une petite fille de cinq ans Clara Foyle décide de quitter l'école seule pour rentrer chez elle en passant par le marchand de bonbons. À sa sortie du magasin, un gentil monsieur l'aborde.... Elle disparaît....
Comme a disparu voici quelques temps une autre gamine qui hante encore les cauchemars de l'inspectrice Etta Fitzroy, mandatée pour enquêter sur ce nouveau kidnapping.
Tout est ainsi mis en place, manquent beaucoup de pièces du puzzle pour le reconstituer complètement. Le jeu à commencé voici trente ans, il est temps de terminer la partie.
Un thème récurrent de ce thriller est la figure paternelle, son rôle auprès de ses enfants, les conséquences de ses manquements, ses lâchetés, ses maltraitances, son indifférence. Et évidemment en parallèle la capacité d'être mère simplement, de pouvoir procréer, et plus encore d'être une bonne mère une fois l'enfant né.
Le Bloody Bones va détruire toute la fausse tranquillité de deux familles, les obligeant à se confronter au miroir, à faire leur examen de conscience. Et l'inspectrice, en mal d'enfant, va s'accrocher désespérément à ces petits disparus au péril de sa vie, de sa santé mentale, sans plus de plan de carrière à promouvoir ou de mariage à sauver.
Un thriller acéré, très bien imaginé et construit, pervers et retors, pavé de pièges et de voies sans issues jusqu'à un final vertigineux dont on tourne les pages très rapidement, essoufflés. L'analyse psychologique de chaque acteurs de ce drame est au scalpel, aucune zone d'ombre n'est laissé dans les ténèbres. La vérité, toute la vérité...
La description psychiatrique du tueur est une véritable chute dans un gouffre d'une extrême noirceur. Quelques flashbacks nous permettent de reconstituer son parcours jusqu'à être ce qu'il est aujourd'hui.
J'ai été de plus particulièrement touchée par les scènes poignantes de poussées lorsque de nouveaux os se forment dans le petit corps de Jakey, sa souffrance, celle de ses parents incapables de le soulager, de l'aider. Ils vivent avec l'idée de la mort de leur enfant depuis sa naissance.... J'ai aussi été émue lorsque des éléments de l'univers enfantin, des doudous, le lapinou, les amis imaginaires, deviennent des remparts à la folie du kidnappeur. L'innocence face au Mal absolu. Les images sont très fortes et s'enregistrent dans notre rétine.
Un très bon Thriller donc, à ne pas laisser passer.
La quatrième de couverture en dit trop à mon avis, je préfère la taire pour que vous soyez emportés comme je le fus par l'histoire à l'aveugle, tel que l'auteure l'a imaginé lors de la rédaction de ce texte.