Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
La vie rêvée de Virginia Fly
Angela Huth
Quai Voltaire / La Table Ronde
Février 2017
218 pages traduites par Anouk Neuhoff
Roman
Chronique
13 avril 2018
Le titre original est « Virginia Fly is drowning » paru en 1972.
En premier lieu l'auteure « est née à Londres en 1938 et vit aujourd'hui dans le Warwickshire. Journaliste réputée, elle a publié de nombreux romans à succès, deux recueils de nouvelles, etc..... Elle a aussi écrit des pièces pour la radio et la télévision et réalisé des documentaires. Dix romans ont paru chez Quai Voltaire, ....dont « Mentir n'est pas trahir » en 2015. »
Ce récit tendrement caustique, furieusement drôle, doucement cruel, nous raconte la vie tumultueuse et fantasmée de Virginia, qui nous apparaît dès le départ tout de même bien atteinte : on ouvre sur son rêve de viol par un moustachu, rêve qu'elle fait dans son lit ou réveillée devant sa classe d'art plastique. Elle en frissonne.
Voilà bien le problème, Virginia rêve son existence, elle ne la vit pas réellement. Elle attend la grande passion, le tsunami, et la voilà coincée à 31 ans, célibataire chez ses parents, à supporter une mère à étrangler, à partager une belle complicité avec son père vieillissant, au lieu d'être avec un mari, chez elle, ou même mère comme toutes ses anciennes copines, comme Caroline.
Enfin la maternité ce serait de toute façon difficile car Virginia est VIERGE. Alors même si ce livre date de 1972, même à l'époque c'est un peu dur à croire, sauf si elle se destine à la vie monacale. Mais non, elle analyse parfaitement sa situation avec un pragmatisme sidérant, elle accepte même d'en parler dans une émission de téléréalité. Là, on vacille de honte pour elle, mais elle non ! Et on rit tant la description du tournage chez les Fly est savoureuse.
C'est de l'humour anglais qui fonctionne parfaitement. Pourtant il y a de l'espoir, car le correspondant américain de Virginia depuis douze ans arrive enfin à Londres. Évidemment notre institutrice s'imagine déjà mariée à Charles. Hum ! Là une scène d'anthologie vous attend entre ses deux spécimens exceptionnels. Toutes les femmes se retrouveront dans certains détails évoqués. Ah, ah !
Et puis, il y a également son ami Hans mélomane, distingué et prévenant, veuf, beaucoup plus âgé, qui l'entoure d'attentions délicates, sans qu'elle percute, hum !
Imaginez donc sa tête quand il voit cette jeune femme qu'il apprécie tant, avouer sa virginité à la face du monde. Il lui adresse immédiatement un courrier pour lui proposer un rdv, il veut lui apporter son assistance.
Une certaine Mrs Thompson aussi, veuve, ancienne prostituée, écrit à cette cause perdue, proposant ses services de professionnelle de la séduction.
Toute une galerie de personnages à peine caricaturés et irrésistibles, quelques fois grotesques ou pitoyables, le plus souvent charmants car improbables et attendrissants. Attention cela peut être une fable absurde, c'est en fait une description psychologique tout en sourdine et finesse de certains oubliés, perdus de la vie, bouffons, qui n'ont pas reçu le mode d'emploi. Des inadaptés, mais nous, le sommes-nous vraiment en toute circonstance ?
Alors que va-t-il enfin arriver à Virginia dans la réalité, va-t-elle réussir à s'en contenter, à comprendre où est son bonheur, le vrai....?
Très bien observé, ce roman n'a pas pris une ride, malicieux et humoristique, et étonnant d'à propos dans une époque où la solitude est le mal de l'époque, où la communication n'est quelques fois que virtuelle. À méditer en souriant, et surtout « carpe diem ».